jeudi 26 janvier 2012

Interview The Dodoz (2011)

Cette interview est à retrouver dans le numéro 11 de Crumb Magazine.


14h10, Vincent s’approche de nous, l’air penaud. «C’est vous Crumb ? -C’est nous.». Voix grave, cernes prolongées, la nuit a été visiblement longue. Une bière plus tard, le reste du groupe nous rejoint. Géraldine, Jules, Adrien et Vincent sont les Dodoz.
Depuis leur passage très remarqué sur la compil CQFD des Inrocks en 2008 et un premier album éponyme applaudi par la critique, les toulousains ont le vent en poupe. Redonnant leurs lettres de noblesses aux jeunes groupes de rock en créant un son qui n’appartient qu’à eux, les quatre adulescents contaminent leurs auditeurs par leur énergie folle. Des riffs aiguisés et des choeurs masculins soutenus par une batterie chauffée à blanc mais aussi et surtout par la voix acidulée de Géraldine.
On s’est demandé d’où émanait toute cette force brute et c’est en regardant d’un peu plus prés leur bio que l’on a compris. Les trois garçons se sont rencontrés sur des planches à roulette. Planches qu’ils ont été contraint de délaisser quelques années plus tard afin de fouler en un seul morceau d’autres types de planches, celles cirées des nombreuses scènes européennes.
Chez Crumb, on a du mal à canaliser les multiples passions qui nous animent, c’est pourquoi on a décidé d’aller choper deux skates et d’en faire profiter nos quatre invités tout en leur parlant musique. L’espace de quelques heures, la ville rose est devenue la ville rock.
Comment vous êtes vous rencontrés ?

Géraldine : On s’est rencontré au collège, j’étais en 4ème avec Vincent, Jules et Adrien prenaient le même bus que moi. De fil en aiguille on est tous devenus potes.

Qui a décidé de monter le groupe ?

Géraldine : On a jamais vraiment décidé de monter un groupe en fait, c’est surtout les trois garçons qui allaient skater l’après midi et quand ils rentraient on se rejoignait et ils jouaient du blues.

Vincent : Ouais on faisait du blues et des reprises de morceaux de rock qu’on aimait bien. Et pour notre premier concert, la soirée moule/frites de Montgiscard (rires), il nous fallait une chanteuse donc on a proposé à Géraldine qui a accepté directement.

Vous vous appelez les Dodoz, un poulet sans aile qui s’est fait bouffé par tous les autres prédateurs, c’est pas un peu contradictoire avec l’envol de votre carrière ?

Vincent : (sourire) Ben on essaie de le faire revivre justement, on veut réhabiliter le dodo et lui donner un second souffle !

Vous avez arrêté vos études en 2008 pour vous consacrer entièrement à la musique, pensez vous que vivre de son art est encore valable en 2011 ?

Vincent : Bah j’ai tenté la fac après le BAC, j’y suis allé 6 heures puis on a commencé à faire des concerts, ça marchait pas encore vraiment mais je préférais quand même aller aux concerts qu’en cours..!

Géraldine : Après en ce qui concerne vivre de son art, on espère que c’est encore possible, même si c’est plus dur qu’à une certaine époque.. On a quand même la chance en France d’avoir le statut d’intermittent et d’arriver à en vivre.

Que pensez vous de cette crise de la musique ? Qu'avez vous envie de dire aux gens qui ont téléchargé illégalement votre musique mais qui viennent à vos concerts ?

Vincent : Tant mieux ! On est ravi que les gens écoutent notre musique même s’ils l’ont téléchargé, on est les premiers à faire ça et limite on préfère aller par la suite voir le groupe en concert et acheter l’album sur place sachant qu’ils touchent beaucoup plus comme ça qu’en l’achetant à la FNAC.

Géraldine : Après c’est paradoxal parce que si tout le monde fait ça, il n’y a plus de maisons de disques et donc plus d’album.. On a pas vraiment de solution à ce problème..!

Vous avez commencé très jeunes d’abord avec le festival des Inrocks, puis les premières parties des Babyshambles ou Stéréophonics, est-ce que cette popularité immédiate ne vous a pas trop fait perdre les pédales ?

Géraldine : En fait ça a pas été vraiment immédiat.. Enfin, la plupart des gens nous ont découvert là mais pour nous ça faisait déjà 4 ans qu’on était formés quand on a eu tout ça, on tournait en France seuls, en train avec nos guitares, on dormait chez des fans de la première heure qui nous hébergeaient.. Après quand on a fait de plus gros concerts on était super contents mais on a toujours réalisé ce qu’il se passait et on en profitait vraiment, sans se demander si ça continuera ou pas.

Vincent : Le truc aussi c’est que les gens perdent souvent les pédales quand ils restent à Paris. Nous on rentrait souvent chez nous dans le cocon familial pour garder les pieds sur terre, en restant loin de toute la hype et en voyant nos potes qui nous voient toujours pareil.

Géraldine : Oui et il y a des gens dans la rue qui viennent nous voir pour nous dire qu’ils aiment ce qu’on fait...

Vincent : ..Ou que c’est de la merde ! (rires)

Ah bah oui, vous êtes plus exposés à la critique..

Vincent : Haha oui, surtout quand les gens sont un peu saouls et qu’ils nous ont un peu reconnu, on a droit à un peu de tout mais souvent c’est plutôt en bien quand même.

Géraldine : Et puis on a des critiques drôles aussi, je me souviens du mec qui n’aimait pas la voix du chanteur, ça m’a fait mal ! (rires)

Votre nouvel album Forever I Can Purr qui sort en début d’année prochaine a été mixé par Mike Crossey (ndlr : Arctic Monkeys, Foals, Kooks, Razorlight..), comment s’est passé l’enregistrement ?

Géraldine : Ben on a pas enregistré avec lui, on a enregistré au Vega Studio avec notre producteur, Peter Murray et notre ingé son Bertrand Montandon. Un super studio avec tout plein de matos vintage et une super console. Après on lui a tout envoyé, il l’a mixé à Liverpool et il nous a donné de super bons retours.

Ca sera quoi justement l’esprit de ce deuxième album ?

Vincent : Ce sera plus réverberé, c’est à dire qu’on a voulu que le disque soit plus large, que les sons soient enregistrés comme dans une pièce plus vaste avec des échos. Plus nuancé aussi mais toujours tourné vers le live.

Quand vous composez, par quoi êtes vous influencés ? Et comment vous procédez ?

Vincent : Par pas grand chose en fait.. (sourire) Enfin, on écoute tellement de trucs différents que c’est impossible de mixer le tout. Mais c’est quand même très terre à terre, quand yen a un qui trouve un riff, l’autre trouve autre chose et c’est un peu mathématique, chacun met son grain de sel.

Géraldine : Après pour les paroles c’est toujours un peu lointain, on aime bien que chacun interprète comme il veut.

L’an dernier, vous aviez été qualifié par les anglais de « jeunesse dans sa forme la plus pure », vous voulez toujours que l’on vous voit comme ça ?

Géraldine : Bah cette phrase là ne me dérange pas du tout quand c’est le bon côté de la jeunesse qui est exposé, la fraicheur, la naïveté, l’énergie...etc. C’est super positif. Après quand c’est le mauvais côté du genre «les baby rockers, ils sortent du lycée, ils ont 17 ans» alors qu’on en a 23 maintenant c’est un peu relou, c’est plus la peine de nous en parler.

Vous connaissez probablement le groupe californien homonyme The Dodos avec un S, vous est-il arrivé d’avoir quelques uns de leurs fans à vos concerts et inversement ?

Vincent : C’est déjà arrivé que des gens nous découvrent par eux en tout cas.

Votre plus grosse honte sur scène ?

Vincent : (rires) Jules a un record des blagues les plus pourries sur scène, après je sais pas si on peut vraiment parler de honte parce que c’est lui qui le cherche et qui en redemande soirs après soirs. Des bides internationaux, même dans la salle personne ne sourit.

Un exemple pour illustrer peut-être ?

Vincent : Bah quand on était à Lille, on avait mangé du kangourou dans un resto et entre deux chansons, Jules adore dire ce qu’on a mangé, que c’est génial tout ça. Et là il marque une pause, et puis il commence à sauter. Et en fait là, personne n’a vraiment compris ce qu’il se passait, il a continué à sauter tout seul. Après on a saisi mais on préfère ne jamais le suivre ! (rires)

Vous improvisez sur scène ?

Vincent : Pas vraiment, ou alors quand on a pas le choix. Lors d’un festival, on a eu une coupure de courant, tout le festival était dans le noir. On avait la batterie qui meublait en acoustique et quand le courant est revenu ça a explosé et on a reprit les instruments petit à petit, les gens ont bien aimé au final. C’est vrai qu’après ya beaucoup de groupes qui se seraient cassés de scènes mais en cas de soucis on essaie quand même de braver le danger... (sourire)

Géraldine : ...Ça peut très vite être nul aussi attention ! (rires)

Quelle est votre scène préférée ?

Géraldine : Moi je dirais la Flèche d’Or à Paris, l’Ubu à Rennes et le Bikini à Toulouse.

Vincent : Ya aussi de très bonnes scènes en Europe de l’Est contrairement à ce que l’on pourrait penser.

Votre album a été maintes fois retardé, une raison particulière ?

Vincent : En fait il y a eu plusieurs versions et entre temps on composait plusieurs chansons, donc on re-sélectionnait chansonselles qu’on prenait et on a fait ça trois fois donc au final, il y aura la crème de la crème de nos deux ans !


Merci les Dodoz.


Interview recueillie par Paul Bousquet et Théo Moncassin.
Crédits Photos : Alexis Pech







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